11-18 octobre 2022

Programmation

Séoul à bout de course

Aucun centre historique ne nous permettra de nous repérer. Aucun monument emblématique ne nous aidera à reconnaître la ville où nous nous trouvons. Au contraire, le fleuve Han, large de 1 km, traverse la ville et accentue cette impression de division, d’éclatement, de centralité disparue. Séoul avec ses 10 millions d’habitants est bien la mégalopole que nous imaginons: tentaculaire, frénétique, jamais endormie, jamais rassasiée… Les cinéastes coréens la représentent la plupart du temps en mouvement. En cela rien de nouveau, depuis les débuts les réalisateurs du monde entier ont filmé ‘’la ville’’ comme une métaphore de la vitesse, de la modernité corruptrice: l'espace de tous les vices.

Non, l'originalité coréenne viendra davantage de ses personnages et de la manière dont ils vont évoluer dans la ville. Mais que se passe-t-il ? Le film vient à peine de commencer et déjà le héros semble fatigué, exténué, à bout de course. Moralement ou physiquement, voire les deux à la fois, le personnage principal auquel le spectateur va devoir s’attacher est au bout du rouleau.

Dans The Chaser (Na Hong-jin, 2009), le “héros” est un ancien flic devenu proxénète qui devra littéralement retourner Séoul pour retrouver l’une de ses prostituées séquestrée par un terrifiant tueur en série. Puis dans Hard Day (Kin Seung-hun, 2015) le policier propre sur lui que nous découvrons au volant de sa voiture, renverse un piéton… et cache le corps dans son coffre.

Le cinéma coréen a la grande originalité de proposer aux spectateurs des héros qui n’en sont pas. Là où le cinéma américain présente souvent des personnage maîtrisant leur espace ou apprenant à le maîtriser au cours de l’histoire, les protagonistes séouliens subissent au contraire leur environnement. C’est sa fragilité dans l’espace qui nous est montrée. On ne compte plus les chutes ou glissades dans les petites rues escarpées de Séoul. On ne compte pas non plus le nombre de chutes dans Parasite (2019) et The Host (2006) de Bong Joon-Ho.

Dans The Host justement, c’est toute une famille de déclassés qui devra emprunter un parcours sinueux dans Séoul et contourner une société sous emprise américaine pour tenter de retrouver la petite dernière enlevée par un monstre. Enfin avec Retour à Séoul (Davy Chou, 2022), Freddie, une adoptée, débarque de France pour retrouver ses origines dans la capitale. Son séjour à Séoul va très vite la laisser exsangue et perdue.

Alors, si tous ces personnages semblent bien fragiles et à bout de course lorsque le film démarre, c'est peut-être bien nous, spectateurs, qui nous retrouverons à la fin des séances à bout de souffle…

Renaud Dehesdin, programmateur

Hard Day
Hard Day

Corée du Sud

Parasite
Parasite

Corée du Sud

Retour à Séoul
Retour à Séoul

France, Allemagne, Belgique, Qatar

The Chaser
The Chaser

Corée du Sud

The Host
The Host

Corée du Sud

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